Vos fiches sont à jour.
Vos VLEP sont respectées.
Vos produits dangereux sont identifiés.
Et pourtant… quelque chose vous échappe.
Dans de nombreux ateliers, les opérateurs ne respirent pas un polluant à la fois, mais un mélange, un air composite fait :
Ce phénomène s’appelle la polyexposition. Et s’il reste mal défini dans les textes, il est bien présent dans l’air industriel.
Chez JC’aiR, nous constatons tous les mois les mêmes situations :
Depuis plusieurs années, l’INRS, l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) ou la DGT (Direction Générale du Travail) alertent : les expositions croisées peuvent multiplier les risques, même à doses faibles, même quand chaque substance est “sous contrôle”.
Le problème ? Aucune norme ne vous dit comment les évaluer. Et trop souvent, aucune action n’est déclenchée.
Cet article vise un objectif simple : vous aider à voir ce que vos outils de conformité ne montrent pas, et à agir sans attendre la preuve absolue, là où l’air devient un risque croisé.
En industrie, la gestion du risque chimique repose souvent sur une question : “Suis-je exposé à un polluant dangereux ?”
Mais cette question est incomplète.
Dans la réalité d’un atelier, on ne respire jamais un seul polluant à la fois. On respire un mélange, un air composite, dans lequel se combinent aussi peu que possible :
C’est ce qu’on appelle la polyexposition :
👉 une exposition simultanée ou successive à plusieurs agents chimiques, parfois à très faibles doses, mais avec des effets cumulés, synergiques, ou renforcés.
Ce phénomène est documenté depuis plusieurs années par l’INRS, l’ANSES, et l’ECHA.
Mais sur le terrain, il reste largement sous-estimé.
🧪 Cocktail toxique : 1 + 1 ≠ 2
Contrairement à une idée reçue, deux substances tolérées séparément peuvent devenir problématiques ensemble.
Les effets combinés peuvent :
(synergie)
agir sur des organes cibles différents
(effet additif)
entraîner des réactions croisées imprévues
(modification métabolique)
L’INRS évoque même dans certaines fiches techniques (ex. ED984, ED6224) des cas où l’exposition croisée multiplie le risque, sans aucun dépassement individuel de VLEP.
Et pourtant, aucune évaluation réglementaire n’intègre systématiquement cette dimension. Chaque substance est encore analysée isolément, dans des conditions souvent éloignées de la réalité terrain.
Depuis 2022, plusieurs signaux convergent :
En clair : plus on industrialise, plus on multiplie les sources. Donc plus on expose sans le voir.
🚩 Polyexposition = invisible dans Excel, tangible dans l’air.
En matière de réglementation
En matière d’exposition professionnelle, la réglementation fait ce qu’elle peut… mais elle segmente.
Chaque substance chimique est évaluée séparément, avec :
Et c’est logique : les seuils réglementaires sont pensés par molécule, sur la base de toxicités connues et de données toxicologiques isolées.
Dans la réalité
📌 Problème : sur le terrain, l’air ne segmente pas.
Il circule, mélange, interagit.
En pratique, un opérateur peut être exposé :
Mais tant que chacune de ces substances reste sous sa VLEP réglementaire, le système considère que tout va bien.
Et pourtant… le risque réel, lui, n’a rien de linéaire.
Identification des produits via les FDS
Classement selon leur danger (CMR, irritants, corrosifs…)
Évaluation du risque produit par produit
Plan d’action par substance
Ce modèle a un mérite : il permet d’agir. Mais il a un angle mort majeur :
👉 Il ne tient pas compte de l’exposition globale de l’opérateur.
Autrement dit :
Résultat :
Un faux sentiment de maîtrise. Les matrices Excel sont remplies, les cases sont cochées, mais l’analyse réelle de l’air respiré à un instant T est absente.
Et quand une mesure est réalisée, elle porte souvent sur une seule substance, à un moment précis, dans des conditions “calmes”.
❌ Le croisement des expositions n’est ni documenté, ni anticipé, ni évalué.
❌ Et donc, il n’est jamais réduit.
Dans de nombreux sites industriels, la démarche de conformité est sincère. Les FDS sont tenues à jour, les VLEP sont connues, des mesures ponctuelles sont réalisées, parfois même des campagnes INRS sont citées en référence.
Mais tout cela repose sur une vision fractionnée de la réalité.
Une substance = une fiche = un seuil = une réponse.
Et dès que cette logique est appliquée à la lettre, on peut aboutir à un paradoxe très courant :
Parce que :
Aucune VLEP ne l’exprime.
🎯 La conformité substance par substance crée un faux confort réglementaire.
Elle rassure la hiérarchie, mais elle ne protège pas l’opérateur.
En atelier, la polyexposition n’est pas une hypothèse théorique :
Elle se produit dès lors que plusieurs polluants coexistent dans un même espace ou dans un même temps.
Certaines combinaisons sont fréquentes, mais rarement identifiées comme telles dans les matrices de risque.
Voici les plus courantes observées sur le terrain :
Solvants + CMR
Poussières métalliques + vapeurs acides
Chrome VI + particules fines
PFAS + solvants + chaleur
Ces combinaisons ne sont pas des cas marginaux. Elles concernent des ateliers “standards”, dans des secteurs que JC’aiR accompagne au quotidien.
Et dans 80 % des diagnostics, le site lui-même ignore l’existence du mélange.
La présence simultanée de plusieurs polluants n’est que la première couche du risque. Dans les faits, certains facteurs de terrain viennent amplifier la dangerosité de la polyexposition, souvent sans être identifiés comme tels.
Voici les principaux accélérateurs de risque observés sur site :
Température et chaleur ambiante
Résultat : une concentration plus élevée dans l’air… et un seuil de tolérance abaissé physiologiquement pour l’opérateur.
Confinement et faible renouvellement d’air
Exemple typique : un local technique en sous-sol avec peinture, acide et solvants stockés = cocktail diffus + absence de surveillance.
Flux croisés et captages déséquilibrés
Résultat : les polluants ne sont pas extraits… ils sont déplacés. Vers les opérateurs.
Postes polyvalents et mobilités croisées
C’est le schéma de base du “cocktail invisible”.
Ce ne sont pas des situations extrêmes.
Ce sont des réalités banales dans des ateliers conformes sur le papier.
Et c’est pourquoi le risque combiné reste souvent ignoré jusqu’à l’incident ou au contrôle.
Vous pensez que votre atelier est bien ventilé, mais vous n’avez jamais croisé les flux réels ?
Un audit terrain suffit souvent à lever les angles morts.
À utiliser comme un outil de terrain, pour ouvrir l’œil sur les interactions invisibles entre polluants et conditions d’ambiance.
| 🔍 Situation | ⚠️ Risques potentiels |
|---|---|
| Plusieurs produits chimiques utilisés dans un même atelier | ✔️ Risque combinatoire possible |
| Opérateur affecté à plusieurs postes avec substances différentes | ✔️ Exposition successive non tracée |
| Captage en place mais mal orienté / mal utilisé | ✔️ Polluants résiduels en dispersion |
| Température ambiante > 25°C ou process chaud | ✔️ Volatilisation / perméabilité accrues |
| Matrice d’évaluation par substance uniquement | ✔️ Angle mort sur l’air respiré réellement |
| Absence de métrologie combinée / multi-substances | ✔️ Aucun repère sur l’exposition réelle |
| Présence de PFAS, solvants, poussières, chrome VI dans le même atelier | 🔴 Zone de vigilance majeure |
Un seul “oui” n’est pas forcément alarmant. Mais 2 ou 3 réponses positives indiquent un besoin d’analyse approfondie, notamment sur la dynamique des flux et la nature des substances.
Vous ne gérez pas juste des produits : vous gérez un air composé, un cocktail.
Sur le papier, la réglementation française et européenne encadre solidement le risque chimique en milieu professionnel. Plusieurs textes structurent les obligations de prévention :
Mais aucun de ces textes n’impose d’évaluation combinée.
Chaque substance est traitée isolément :
Résultat : l’analyse réglementaire est morcelée et le risque global, souvent absent des radars.
Dans beaucoup de cas, ces erreurs de lecture de seuil deVLEP sont liées à des défauts de ventilation, comme expliqué dans cet article dédié aux erreurs ICPE les plus courantes.
L’absence de norme ne signifie pas absence de devoir.
Face à une plainte, un contrôle ou une pathologie professionnelle, l’employeur reste responsable de la santé et de la sécurité de ses salariés, même lorsque la réglementation n’impose pas une méthode d’analyse précise.
Ce que les inspecteurs, les magistrats ou les assureurs regarderont, c’est :
Et sur ce point, la jurisprudence évolue vite : la méconnaissance des effets combinés n’est plus un argument recevable.
Le problème, c’est l’absence d’obligation concrète.
La polyexposition n’est pas un oubli. C’est une zone grise, connue mais non prise en charge formellement par les textes en vigueur.
Le problème, c’est l’absence d’obligation concrète.
Aucun seuil combiné
Aucune méthode d’évaluation standardisée
Il n’existe pas d’outil opérationnel validé pour :
Résultat : chacun fait comme il peut, et le plus souvent, ne fait rien.
Une dilution de la responsabilité
Sans cadre clair :
Et en cas d’incident ou de pathologie professionnelle, il est quasi impossible de déterminer quelle substance est responsable.
C’est donc l’exposition globale qui est la vraie coupable, mais elle n’est jamais jugée.
Ce n’est pas un défaut de vigilance. C’est un défaut de structure. Et tant que ce vide n’est pas comblé, la polyexposition restera un risque silencieux.
Polyexposition : une zone grise juridique, mais une réalité nette en atelier.
La vraie exposition ne vit pas dans un tableau Excel ou un rapport COFRAC.
Elle se manifeste dans l’air que vos équipes respirent. Et cet air, il faut l’observer, pas seulement le modéliser.
L’évaluation des risques chimiques commence presque toujours par une analyse documentaire : FDS, SEIRICH, inventaire des substances.
Mais cela ne suffit jamais.
Il faut aller au poste, dans les phases réelles de production, et regarder :
C’est une cartographie des situations respirées.
Un atelier peut être divisé sur le plan, mais totalement poreux dans l’air.
Ce sont ces zones de chevauchement, souvent non identifiées, qui créent les expositions invisibles.
Les opérateurs savent. Ils savent quand “ça pique un peu plus que d’habitude”, quand “l’odeur est plus forte dans l’angle”, quand “la chaleur fait ressortir les solvants”.
🗣️Ces retours ne sont ni subjectifs, ni anecdotiques : ils sont les premières alertes d’un déséquilibre.
Et pourtant, ils sont rarement formalisés dans l’évaluation des risques.
📌 Une bonne évaluation de la polyexposition ne commence pas avec un outil. Elle commence avec un regard ouvert sur le réel.
C’est l’outil principal pour comprendre la dynamique réelle de l’air.
Contrairement à une simple mesure de débit ou une vérification de VLEP, l’audit aéraulique traite l’air comme un système vivant : ce qu’il est.
Il ne suffit pas de savoir ce qui est utilisé. Il faut savoir qui y est exposé, quand, combien de temps, dans quelles conditions.
Cela implique :
Même un plan clair en apparence peut masquer une concentration d’exposition dans une zone négligée : entre deux postes, près d’un retour d’air, à l’entrée d’un local technique…
La métrologie a son rôle :
Mais elle reste ponctuelle (instant T) et dépendante du contexte de réalisation (porte ouverte, ventilation arrêtée, etc.).
📌 Un bon diagnostic de polyexposition ne repose pas sur un chiffre. Il repose sur un croisement d’informations réelles, venues du terrain, des flux, des substances… et de l’observation intelligente.
Vous avez déjà des mesures, mais pas de vision d’ensemble ?
Nos audits aérauliques considèrent déjà l’analyse des risques croisés.
Dans la logique réglementaire, chaque polluant est traité à part.
Dans la réalité industrielle, les expositions se superposent.
Le vrai risque ne vient pas des substances… mais de l’endroit où elles se croisent.
Le bon réflexe :
✔️ Oublier la fiche produit pour un moment
✔️ Regarder où les opérateurs manipulent, transvasent, pulvérisent, ou simplement restent exposés longtemps à plusieurs familles chimiques
Là où deux sources se croisent, le risque monte en flèche même si chaque source, prise seule, semble maîtrisée.
Là où deux sources se croisent, le risque monte en flèche même si chaque source, prise seule, semble maîtrisée.
L’air est un milieu vivant. Et dans ce milieu, ce sont les concentrations croisées qu’il faut piloter.
La polyexposition impose un changement d’échelle dans la prévention :
Et ce qui se diffuse participe à la polyexposition, même à faibles doses.
🟦 Le couple gagnant : captage précis + aéraulique maîtrisé
L’enjeu : orchestrer l’air, pas simplement le déplacer.
🟦 Ce qu’il faut vérifier concrètement
Un système aéraulique ne protège que s’il est équilibré, monitoré, et compris.
La majorité des sites industriels n’ont ni une vue dynamique de leur air, ni de stratégie de captage pensée pour le risque combiné.
Agir sur l’ensemble, c’est protéger les zones floues, pas seulement les postes désignés.
En matière de polyexposition, l’attentisme est fréquent : “On n’a pas de mesure précise, donc on ne peut pas agir.”
Mais cette posture est un piège parce que :
🟦 L’incertitude ne doit pas paralyser l’action
Quand plusieurs substances coexistent, il est légitime d’agir préventivement, même sans dépassement mesuré.
C’est exactement ce que recommande le Code du travail : réduire l’exposition au plus bas niveau techniquement possible.
Cela peut passer par :
L’objectif n’est pas la perfection. C’est la réduction maximale du risque combiné, avec les moyens disponibles.
5 idées reçues sur la polyexposition
“Si chaque substance est sous sa VLEP, je suis tranquille.”
❌ Faux
“On n’a pas de mesure, donc pas de problème.”
❌ Le nez ne détecte pas les interactions
“C’est un sujet pour les chercheurs, pas pour l’industrie.”
❌ Erreur fréquente
“Le DUERP couvre ça.”
❌ Pas du tout, sauf cas très avancé
“On verra si un jour les textes changent.”
❌ Quand ça arrive, c’est trop tard
🟦 Un bon diagnostic vaut mieux qu’un seuil impossible à définir
Attendre le chiffre idéal, c’est souvent ne jamais agir, ou le faire trop tard.
Mieux vaut un diagnostic aéraulique solide, une lecture attentive du terrain, et des actions progressives que la recherche d’un seuil parfait qui n’existe pas.
📌 Face à un risque mal encadré, la maîtrise technique redevient un levier stratégique. Et c’est ce qui peut transformer un site “en règle” en site réellement protecteur.
La polyexposition n’est pas un concept de laboratoire. C’est une réalité de terrain, observable dans des ateliers conformes, mais vulnérables.
Et c’est justement là que réside le piège : la conformité substance par substance masque parfois l’exposition réelle.
L’enjeu pour les industriels n’est pas simplement de répondre à une norme, mais de reprendre la main sur la qualité de l’air dans sa globalité.
Cela suppose de :
voir au-delà des cases à cocher,
croiser les flux, pas seulement les produits,
agir avant que les effets cumulés ne deviennent visibles… ou irréversibles.
📌 Audit global, vision aéraulique, stratégie intégrée
Ce sont ces leviers-là que JC’aiR mobilise chaque jour pour aider les industriels à transformer la vigilance en maîtrise technique.
Vous vous interrogez sur la réalité des expositions dans votre atelier ?
Vous suspectez un croisement de polluants, mais vous ne savez pas par où commencer ?
🎯 Nous pouvons vous aider à y voir clair sans tout refaire.
Confidentialité garantie